Crédit immobilier : vers une réforme de l'usure en 2023 ?

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La problématique de l'usure est le sujet qui fâche du moment. Les relations sont tendues entre la Banque de France et les courtiers. Ces derniers mettent en cause un mode de calcul obsolète, inadapté à l'évolution rapide des taux d'emprunt. Résultat, des milliers de foyers sont privés de crédit immobilier en raison du taux d'usure. Nombreux sont les professionnels à réclamer une réforme de ce mécanisme qui, au lieu de protéger les ménages, les empêche aujourd'hui d'accéder à la propriété.

Taux d'usure : une protection contre les pratiques abusives

Depuis des mois, des milliers de foyers remettent aux calendes grecques leur projet immobilier car le financement bancaire leur est refusé. Non pas qu'ils ne soient pas solvables, mais le plafond de verre de l'usure bloque leur demande. Pour comprendre le phénomène, il faut rappeler ce qu'est un taux d'usure et comment il est défini.

Le taux d'usure est le Taux Annuel Effectif Global maximum que les banques commerciales ne peuvent dépasser. Ce taux plafond légal exprime le coût global maximum autorisé et contient tous les frais relatifs à l'octroi du crédit. En matière de prêt immobilier, aux intérêts, s'ajoutent diverses dépenses incompressibles :

  • les frais de dossier
  • la garantie (hypothèque, privilège du prêteur de deniers)
  • les primes d'assurance emprunteur.

D'autres frais peuvent être intégrés dans le calcul du TAEG s'ils sont exigés par la banque (expertise du bien, frais d'ouverture et de tenue de compte, commission de courtage).

Le taux d'usure est calculé chaque trimestre par la Banque de France sur la base de TAEG moyens observés le trimestre précédent, et majorés d'un tiers. Il y a donc un décalage d'au moins trois mois entre la fixation de l'usure et la prise en compte de l'évolution des taux d'intérêt. Un décalage d'autant plus important que les taux se négocient plusieurs mois avant la signature de l'offre de prêt. Cette inertie de l'usure a pour conséquence de freiner l'accès au crédit immobilier en période de hausse brutale et continue des taux d'intérêt par un phénomène redouté : l'effet ciseau.

Solvables mais privés de crédit !

Les premières victimes de ce couperet sont les ménages modestes et les primo-accédants. Abonnés aux taux d'intérêt les plus élevés et aux durées d'emprunt les plus longues, ces profils ne peuvent emprunter, car le seuil de l'usure trop proche du taux débiteur laisse une marge de manœuvre trop faible pour intégrer tous les autres frais dans le TAEG. Ils ne sont plus les seuls à être recalés.

Depuis juillet 2022, près de la moitié des demandes de crédit immobilier seraient mises sur la touche à cause de l'usure. Beaucoup d'entre elles concernent des ménages parfaitement solvables dont le taux d'endettement est pourtant inférieur aux 35% imposés par les autorités financières depuis janvier 2021.

L'espoir est revenu avec la révision des taux d'usure au 1er octobre 2022. Mais les 48 points de base additionnels pour les prêts de 20 ans et plus (3,05% au lieu de 2,57%) sont vite grignotés par la progression des taux d'intérêt. Une hausse de l'usure bientôt insuffisante, donc, face à la dégradation actuelle et future des conditions de refinancement des banques et leur répercussions sur les barèmes de taux.

Le secours d'un courtier en crédit immobilier est plus que jamais indispensable pour optimiser ses chances d'obtenir le financement de son projet immobilier. Seul un professionnel peut négocier d'égal à égal avec les banques dans un contexte compliqué où certains établissements ont tout simplement fermer le robinet du crédit en attendant que la situation se normalise.

Comment réformer l'usure ?

Il est en effet anormal et inacceptable qu'un mécanisme censé protéger les consommateurs empêche des ménages solvables de concrétiser le projet d'une vie, et d'attendre que les taux d'usure remontent pour accéder peut-être au crédit et s'endetter plus lourdement. Un constat qui hérisse les courtiers, premiers témoins de la détresse et de l'incompréhension des candidats refusés.

Beaucoup appellent à une réforme de l'usure, sans que la solution préconisée fasse consensus. Certains réclament un changement de la méthode de calcul, au moins provisoirement de manière dérogatoire comme le prévoit la réglementation en cas de variation brutale du coût des ressources des banques (article L.314-8 du Code monétaire et financier). C'est un "non" catégorique du côté de la BdF qui a annoncé dans un communiqué du 20 septembre dernier que la décision de laisser la méthode de calcul inchangée relève d'un choix politique en période d'inflation galopante.

D'autres proposent de réviser l'usure chaque mois pour être plus proche de la réalité du terrain, mais la lourdeur administrative pour faire remonter les données rapidement rend l'option irréalisable.

Les parlementaires prennent eux aussi le sujet au sérieux. Dans une inteview sur BFM TV, Emmanuel Provost, directeur général d'Afi Esca Patrimoine, révèle qu'un amendement au projet de loi de finances 2023 aurait été déposé la semaine dernière, prévoyant de sortir l'assurance emprunteur du calcul de l'usure. Il serait équitable de ne pas tenir compte de l'assurance dans le TAEG, puisqu'il s'agit d'une donnée dépendant du profil de l'emprunteur et non du système.

On n'a pas fini d'entendre parler de l'usure et de son incapacité à réguler décemment l'accès au crédit immobilier. La France a les taux d'usure en matière de prêt à l'habitat les plus bas du monde et sans doute les plus bêtes du monde.

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Les banques font tout pour dissuader l’emprunteur de souscrire un contrat externe, en avançant parfois des arguments fallacieux. Vous pouvez facilement vous rattraper dans un deuxième temps. Depuis l'entrée en vigueur de la loi Lemoine en 2022, les emprunteurs peuvent résilier leur assurance à tout moment, sans frais ni justification. Cette mesure favorise la concurrence et permet de réaliser des économies significatives en comparant les offres du marché.  Utilisez cette opportunité pour trouver une assurance mieux adaptée à vos besoins et à votre budget. Vous pouvez le faire dès le lendemain de la signature de l’offre de crédit. Plus tôt vous engagez la démarche, plus importantes seront les économies, puisque le coût de l’assurance de prêt immobilier est calculé sur le capital restant dû. 3. Comparez les contrats individuels et collectifs Les banques proposent généralement des contrats d'assurance groupe, mutualisant les risques entre tous les emprunteurs. Cependant, ces contrats ne tiennent pas toujours compte des spécificités individuelles.  Les contrats individuels, proposés par des assureurs externes, peuvent offrir des tarifs plus compétitifs et des garanties personnalisées. Il est donc judicieux de comparer ces deux types de contrats pour choisir celui qui vous convient le mieux. Mettez les offres en concurrence grâce à un comparateur d’assurance emprunteur : vous avez accès aux contrats alternatifs les plus compétitifs du marché, en adéquation avec vos besoins et dans le respect de l’équivalence de garanties avec l’assurance bancaire. 4. Analysez attentivement les garanties et exclusions Avant de souscrire un contrat d’assurance emprunteur, il est essentiel de bien comprendre les garanties proposées et les exclusions éventuelles. 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Mutuelle santé : 5 questions à se poser sur le tiers payant

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Bon à savoir : certaines mutuelles limitent le tiers payant à certains professionnels de santé ou à certains actes (ex. : consultations généralistes, pharmacie), alors que d’autres l’étendent largement. Astuce : vérifiez si votre mutuelle est partenaire d’un réseau de soins, car cela favorise l’application automatique du tiers payant chez les professionnels affiliés. Choisir une mutuelle avec tiers payant vous garantit une couverture santé sans avance de frais de manière totale ou partielle (voir plus bas).  Sur quoi s’applique le tiers payant en santé ? Les principes du tiers payant peuvent s’appliquer sur tout acte pris en charge par l’Assurance maladie : consultations, médicaments, analyses, radiologie, hospitalisation… mais avec des variations selon le professionnel ou le type de soin. En pratique, il est quasiment généralisé : en pharmacie  dans les laboratoires d’analyses  dans les centres de santé  dans les hôpitaux publics  chez de nombreux médecins libéraux, notamment généralistes et spécialistes. En revanche, certains secteurs restent à la traîne : dentistes libéraux (hors centres dentaires), kinés, infirmiers, radiologues appliquent le tiers payant de manière plus sélective. Certains soins ne sont jamais concernés, notamment : la médecine douce (ostéopathie, acupuncture, sophrologie…)  la chirurgie esthétique, non remboursée  les médicaments non substituables, sauf si mention du médecin. Est-ce que le tiers payant est automatique ? Non, le tiers payant n’est pas automatique pour tous. Mais dans certains cas, les professionnels de santé ont l’obligation de l’appliquer. Il s’agit notamment de : Bénéficiaires de la Complémentaire Santé Solidaire (C2S)  Personnes couvertes par l’Aide médicale d’État (AME)  Patients en Affection de Longue Durée (ALD)  Femmes enceintes à partir du 6e mois jusqu’à 12 jours après l’accouchement Femmes ayant recours à une IVG  Jeunes femmes de moins de 26 ans dans le cadre de la contraception (actes et contraceptifs) Personnes victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle  Victimes d’un attentat  Personnes bénéficiant de programmes de prévention (M’T Dents, dépistages organisés, etc.). Dans ces cas précis, le tiers payant s’applique de droit, sans que le patient ait besoin d’en faire la demande. Pour les autres assurés, le tiers payant peut être accordé sur présentation des justificatifs (carte Vitale, attestation de mutuelle), mais reste facultatif et dépend de la politique du professionnel de santé. Comment fonctionne le tiers payant ? Le fonctionnement du tiers payant repose sur la présentation de 2 éléments : La carte Vitale, mise à jour  La carte de tiers payant délivrée par la mutuelle santé. Ces documents permettent au professionnel de santé de transmettre directement les informations aux caisses et complémentaires pour un remboursement sans avance de frais. À noter : pour les situations particulières (ALD, grossesse, C2S, etc.), il est essentiel de mettre à jour sa carte Vitale régulièrement, notamment dans les bornes en pharmacie ou en caisse primaire. Pour les patients dans l’incapacité de se déplacer, l’Assurance maladie peut être contactée par courrier ou téléphone pour mettre à jour les droits ou les cartes. En cas de tiers payant accepté, le professionnel de santé est payé directement par l’Assurance maladie et/ou la mutuelle, évitant ainsi une avance pour le patient. Le tiers payant est-il total ou partiel ? Il existe 2 formes de tiers payant : 1. Le tiers payant partiel Il concerne uniquement la part prise en charge par l’Assurance maladie (ex. : 70 % pour une consultation classique). Le patient doit régler le reste à charge, soit : la participation forfaitaire de 2 € par consultation les dépassements d’honoraires éventuels  la part complémentaire, remboursable ensuite par la mutuelle. Exemple : Une consultation à 50 € chez un spécialiste en secteur 2 : L’Assurance maladie rembourse 19 € (70 % de 30 € - participation forfaitaire de 2 €) ; Le patient paie 29 € au médecin, dont une partie sera remboursée par la complémentaire. 2. Le tiers payant total Dans ce cas, le patient ne paie rien sur le moment. L’Assurance maladie prend en charge sa part, et la mutuelle couvre le reste immédiatement. Cela suppose que : Le professionnel accepte le tiers payant intégral. La mutuelle couvre bien les frais restants. Aucun dépassement d’honoraires n’est à la charge de l’assuré (ou est remboursé selon le contrat). Attention : certains frais peuvent malgré tout être déduits ultérieurement par l’Assurance maladie (franchise médicale, participation forfaitaire). Le tiers payant total est le plus avantageux pour les patients, mais il dépend de plusieurs conditions : le contrat de mutuelle, les accords de tiers payant, et l’acceptation du professionnel. Ce qu’il faut retenir sur le tiers payant Le tiers payant est un levier essentiel d’accès aux soins. Il permet d’éviter une avance de frais, mais son application varie selon les actes, les professionnels, et le contrat de mutuelle. Grâce aux obligations sur le 100 % santé et à l’automatisation pour certains publics, le dispositif gagne en accessibilité. Cependant, pour en bénéficier pleinement, il est crucial de : Vérifier les garanties de sa mutuelle  Mettre à jour régulièrement sa carte Vitale  Identifier les professionnels acceptant le tiers payant total. Conseil d’expert : avant chaque consultation, pensez à demander si le professionnel pratique le tiers payant (et sous quelle forme), pour éviter toute mauvaise surprise.

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Assurance emprunteur : contrat bancaire ou individuel, quel est le moins cher en 2025 ?

En 2025, face à un marché immobilier qui se redresse peu à peu et une réglementation favorable à la concurrence, les emprunteurs se posent la question légitime : vaut-il mieux choisir le contrat d’assurance de prêt proposé par la banque ou opter pour un contrat individuel auprès d’un assureur alternatif ? Tour d’horizon du marché, des tarifs et des arbitrages clés pour faire le bon choix. Un marché immobilier en crise mais en voie de stabilisation Depuis 2021, le marché immobilier a connu une baisse drastique de ses volumes de transactions, passant de 1,2 million de ventes à environ 780 000 en 2024. Cette chute, liée à la hausse des taux d’intérêts, a mécaniquement réduit les opportunités commerciales pour l’assurance emprunteur. Mais les signaux d’un redémarrage se précisent : plusieurs assureurs constatent un regain d’activité depuis fin 2024, augurant une reprise progressive en 2025. Cette dynamique nouvelle offre un contexte favorable à une concurrence plus vive entre bancassureurs et assureurs alternatifs. Surtout que la loi Lemoine, entrée en vigueur en 2022, permet désormais aux emprunteurs de changer d’assurance de prêt immobilier à tout moment, sans attendre la date anniversaire du contrat. Loi Lemoine : vers une démocratisation du changement d’assurance Après les lois Lagarde (2010), Hamon (2014) et l’amendement Bourquin (2018), la loi Lemoine représente une avancée majeure en matière de liberté de choix pour l’emprunteur. Elle autorise la résiliation du contrat d’assurance quand l’emprunteur le souhaite, et ce dès le lendemain de la signature de l’offre de prêt, ouvrant ainsi la voie à une véritable concurrence tarifaire. Mais en pratique, les effets de cette loi ont été quelque peu ralentis par le contexte économique. Les bancassureurs, en position de quasi monopole lors de la souscription du crédit (77 % de parts de marché), ne facilitent pas toujours la substitution. Allers-retours administratifs, délais rallongés, contre-offres de dernière minute… autant de freins, certains à la limite de la légalité, qui rendent le changement d’assurance plus complexe qu’il n’y paraît.  Et pour cause, les marges bancaires sur l’assurance de prêt peuvent aller jusqu’à 70%, une manne à laquelle les établissements de crédit ne comptent pas renoncer.  Contrat groupe ou contrat individuel : 2 approches bien distinctes Les banques proposent généralement des contrats groupes, standardisés, avec des garanties mutualisées. Ces formules sont simples à souscrire et directement intégrées au crédit immobilier. En face, les contrats individuels des assureurs alternatifs offrent une tarification personnalisée, souvent plus compétitive, notamment pour les profils jeunes, non-fumeurs ou présentant peu de risques de santé. Quelle part de marché pour les assureurs alternatifs ? Selon les derniers chiffres, les assureurs hors bancassurance détiennent désormais près de 23 % du marché à la souscription. Et leur part ne cesse de croître grâce à la montée en puissance des résiliations post-crédit. Entre 2022 et 2024, le taux de résiliation a d’ailleurs doublé. Le modèle d’acquisition a changé : aujourd’hui, 70 % des contrats individuels sont souscrits après la signature du prêt immobilier. La progression des assureurs alternatifs reste très lente et plus que modérée : leurs parts de marché sont passées de 15,6% en 2021 à 16,1% en 2023, les bancassureurs détenant près de 84% des contrats d’assurance de prêt en stock.  Combien peut-on économiser en changeant d’assurance emprunteur ? C’est la question centrale pour les emprunteurs en 2025 : les contrats individuels sont-ils vraiment plus avantageux financièrement ? D’après le Comité consultatif du secteur financier (CCSF), le bilan est nuancé : Dans 32 % des cas, le contrat de la banque reste moins cher. Dans 36 % des cas, le contrat individuel permet de gagner jusqu’à 2 000 € sur toute la durée du prêt (soit environ 8,50 € d’économie mensuelle sur 20 ans). Dans les 32 % restants, l’écart dépasse les 2 000 €, avec même 2 % des cas où l’économie dépasse 7 000 €. À retenir : les économies potentielles varient fortement selon le profil de l’emprunteur, son âge, son état de santé, la durée restante du prêt et le capital assuré. Critères Contrat bancaire Contrat individuel (en délégation) Tarification Standardisée, peu personnalisée Personnalisée selon âge, profession, santé Coût moyen Souvent plus élevé sur toute la durée du prêt Plus de 7 000€ d’économies potentielles Souscription Automatique avec le prêt immobilier Démarche séparée, souvent avec un courtier Souplesse des garanties Limitée, garanties uniformisées Plus de choix, ajustements possibles, rachat d’exclusion de garantie Accès au changement Résiliation à tout moment grâce à la loi Lemoine, mais manœuvres dilatoires des banques Résiliation à tout moment grâce à la loi Lemoine Profil idéal Emprunteur avec risque aggravé ou prêt court Jeunes, non-fumeurs, bons profils de santé Parts de marché à la souscription du prêt (2024) 77% 23% (en hausse) Une guerre tarifaire toujours plus intense La bataille se joue essentiellement sur le prix. Depuis une dizaine d’années, les assureurs alternatifs ont ajusté leurs grilles tarifaires à plusieurs reprises pour séduire les emprunteurs. Swiss Life, Cardif, Groupama, Alptis ou encore April ont ainsi multiplié les offres et segmenté leur clientèle pour proposer des couvertures adaptées à tous les profils, des jeunes actifs aux professions libérales. Les bancassureurs ont dû réagir : entre 2019 et 2023, leurs tarifs ont baissé de 15 % à 23 % en moyenne. Cette stratégie vise à limiter l’évasion de leurs clients vers la concurrence. L’importance de bien maîtriser la substitution Changer de contrat d’assurance emprunteur reste une démarche encadrée. Pour réussir sa substitution, il faut respecter plusieurs étapes :  envoi d’un nouveau contrat qui présente une équivalence de garanties avec celui de la banque acceptation par cette dernière dans les 10 jours ouvrés mise en place du nouveau contrat et rédaction de l’avenant résiliation de l’ancien.  Cette complexité a incité de nombreux courtiers à investir massivement dans des outils de gestion et des plateformes d’accompagnement. Certains, comme le courtier Magnolia.fr qui propose une palette de 29 contrats, ont même mis en place des services internes dédiés aux procédures de résiliation et de substitution. Objectif : fluidifier le parcours et lever les blocages. Assurabilité, mutualisation… les nouveaux enjeux du marché La baisse des tarifs pose aussi la question de la rentabilité. Avec l’accès à l’assurance emprunteur sans questionnaire médical pour les prêts inférieurs à 200 000 €, le risque de sinistres augmente. Pourtant, le ratio sinistres/primes reste raisonnable (autour de 50 %), bien inférieur à d’autres branches comme l’auto ou la santé. Pour que le modèle reste pérenne, assureurs et banques doivent affiner leur tarification et leur sélection des risques. Certains craignent une segmentation excessive, où seuls les meilleurs profils bénéficient des offres les plus avantageuses, remettant en cause la logique de mutualisation des risques en assurance emprunteur. Ce qu’il faut retenir Le contrat bancaire garde l’avantage de la simplicité et de l’intégration directe à l’offre de prêt. Il reste compétitif pour certains profils, notamment en cas de conditions négociées. En revanche, les contrats individuels se révèlent nettement plus économiques pour deux tiers des emprunteurs, surtout ceux qui prennent le temps de comparer les offres et d’optimiser leur couverture.