Crédit immobilier : le marché en phase de retournement en 2023

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La hausse brutale des taux d’intérêts pèse considérablement sur la production de crédits immobiliers. La capacité d’emprunt des ménages se réduit et les banques, pressées par les contraintes monétaires, peinent à rentabiliser sur ce produit d’appel essentiel. Les autorités financières préfèrent parler de normalisation du marché, après avoir desserré l’étau en mensualisant provisoirement les taux d’usure. Mais force est de constater que les chiffres indiquent une demande en berne, marquée par un attentisme généralisé. Le marché immobilier est-il à l’aube d’un retournement ?

Marché immobilier au ralenti

La période bénie d’argent facile est bel et bien derrière nous. Après de longues années de taux d’intérêts au plancher qui ont soutenu la demande, la guerre en Ukraine rebat les cartes, entraînant dans son sillage l’envolée de l’inflation et l’obligation pour la Banque Centrale Européenne de durcir sa politique monétaire. Les réseaux bancaires sont soumis à la remontée drastique des taux directeurs de la BCE, à un rythme inédit depuis 30 ans. Elles se refinancent désormais au taux de 3,50% contre 0% avant juillet 2022. La hausse du taux de la BCE a un impact sur le crédit immobilier, devenu moins accessible car beaucoup plus cher qu’il y a tout juste un an. 

De 1% en janvier 2022, le taux moyen sur 20 ans oscille actuellement entre 3,20% et 3,50% (hors assurance prêt immobilier et coût des sûretés) et les prévisions indiquent que des taux à 4% sont attendus pour l’été 2023.

Résultat, la production de crédits immobiliers, qui avait commencé à sérieusement ralentir au dernier trimestre 2022, continue de chuter en ce premier quart de l’année 2023. Selon l’Observatoire Crédit Logement, la production recule de 32% par rapport à fin 2019.

Pression sur le pouvoir d’achat immobilier

Selon la Banque de France, 15 milliards d’euros de prêts à l’habitat ont été distribués en janvier 2023, contre plus de 20 Md€ dans les années fastes comme 2021. Pour les institutions financières, le phénomène n’est qu’une normalisation après des millésimes d’abondance… qui avaient d’ailleurs conduit à la mise en place de normes d’octroi des crédits immobiliers pour éviter la surchauffe.

Il y a deux ans, le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) édictait des règles devenues entre temps des normes juridiquement opposables aux établissements de crédit :

  • Le taux d’endettement est plafonné à 35% des revenus nets, avant impôt et assurance emprunteur comprise.
  • La durée de remboursement est limitée à 25 ans, voire 27 ans dans certains cas (achat en VEFA ou dans l’ancien avec travaux de rénovation importants).

La capacité d’emprunt des ménages est pressurée par la remontée des taux d'intérêts, alors qu'elle est déjà bridée par ces normes du HCSF. Face à ces règles drastiques, les banques sont contraintes de renforcer leur exigence d’apport personnel. Alors qu’elles se contentaient auparavant d’une mise de départ équivalente aux frais de notaires, elles réclament désormais un apport à hauteur de 15%, voire 20% de la somme empruntée.

Sur un an, la capacité d’emprunt a reculé de 15%. Ce n’est pas tout, une nouvelle exigence bancaire est apparue : l’épargne de précaution, nouveau critère 2023 pour décrocher le graal. Les premières victimes sont les primo-accédants pour qui l’accès au crédit immobilier est toujours difficile, car souvent dépourvus d’une épargne suffisante, à la fois pré et post-crédit.

Sont également pénalisés les emprunteurs de plus de 45 ans pour qui le coût de l’assurance de prêt immobilier, inclus dans le calcul du taux d’usure, compromet leur accès au financement bancaire.

Mensualisation du taux d’usure : utile mais pas suffisante

Le marché du crédit immobilier devrait continuer à s’affaiblir, dans un contexte marqué par un attentisme général. Seuls 3,9% des Français ont l’intention de souscrire un prêt immobilier dans les six prochains mois, selon une enquête de l’Observatoire du crédit aux ménages publiée début mars.

La mensualisation du taux d’usure depuis le 1er février 2023 redonne pourtant des marges de manœuvre, aux banques pour ajuster leurs taux en conséquence des contraintes monétaires, et aux candidats à l’emprunt, car l’écart entre l’usure et les taux du marché résiste davantage. Habituellement calculée à un rythme trimestriel à partir des taux sur les crédits décaissés, l’usure a évolué moins rapidement que les taux directeurs de la BCE, conduisant les banques à refuser des dossiers pour cause d’absence de marges.

Révisés mensuellement jusqu’au 1er juillet prochain, les taux d’usure sont aujourd'hui plus en phase avec la réalité du marché, même s’ils contribuent au mouvement haussier des taux d’emprunt.

Rappelons que le taux d’usure renvoie au TAEG (Taux Annuel Effectif Global) à ne pas dépasser, indicateur du coût final d’un crédit immobilier car il contient tous les frais liés à l’obtention du financement bancaire (intérêts, frais de dossier, garantie, primes d’assurance emprunteur, etc.).

Sans cette décision de la Banque de mensualiser les taux d’usure, les banques auraient fermé le robinet du crédit plus rapidement. Mais si la mesure offre un peu de souplesse, ses effets ne seront visibles que dans quelques mois.

La demande reste toutefois morose. Les acheteurs repoussent leur projet et les vendeurs tardent à revoir leurs prétentions. Les prix de l’immobilier doivent baisser en 2023 pour compenser la hausse des taux. Depuis le début de l’année, le marché du neuf comme de l’ancien est en crise. Il y a aussi un manque d’offres, on assiste à la chute du logement neuf en 2023, engendrée par le net recul de la promotion qui est fragilisée notamment par l’inflation des prix des matériaux.

Dans ce contexte compliqué pour tous les acteurs du marché, les banques demandent à desserrer quelques contraintes, comme celles des normes du HCSF.

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Cependant, ces contrats ne tiennent pas toujours compte des spécificités individuelles.  Les contrats individuels, proposés par des assureurs externes, peuvent offrir des tarifs plus compétitifs et des garanties personnalisées. Il est donc judicieux de comparer ces deux types de contrats pour choisir celui qui vous convient le mieux. Mettez les offres en concurrence grâce à un comparateur d’assurance emprunteur : vous avez accès aux contrats alternatifs les plus compétitifs du marché, en adéquation avec vos besoins et dans le respect de l’équivalence de garanties avec l’assurance bancaire. 4. Analysez attentivement les garanties et exclusions Avant de souscrire un contrat d’assurance emprunteur, il est essentiel de bien comprendre les garanties proposées et les exclusions éventuelles. Les garanties de base incluent généralement le décès et la perte totale et irréversible d'autonomie (PTIA).  Des garanties complémentaires, telles que l'incapacité temporaire de travail (ITT) ou l'invalidité permanente partielle (IPP) ou totale (IPT), peuvent être ajoutées en fonction de votre situation. Assurez-vous également de vérifier les exclusions, comme les sports dangereux, les métiers à risques ou certaines pathologies, qui pourraient limiter votre couverture.​ 5. Tenez compte de votre profil et de votre situation Le coût de l'assurance emprunteur dépend de plusieurs facteurs, notamment l'âge, l'état de santé, la profession et les habitudes de vie. Par exemple, un non-fumeur en bonne santé paiera généralement moins qu'un emprunteur fumeur présentant des problèmes de santé. Certaines professions à risque peuvent également entraîner des surprimes. Il est donc important de choisir un contrat adapté à votre profil pour éviter de payer des garanties inutiles.​ Les assureurs alternatifs sont mieux placés que les bancassureurs pour couvrir les risques accrus en matière de santé, de profession ou de pratiques sportives. Les contrats proposés présentent très souvent des options de rachat d’exclusion de ces risques, ce qui vous permet d’être protégé en cas de survenance d’un sinistre exclu dans les conditions générales. 6. Utilisez des comparateurs en ligne Les comparateurs d'assurance en ligne sont des outils précieux pour évaluer rapidement les différentes offres du marché. En renseignant quelques informations sur votre profil et votre projet immobilier, vous pouvez obtenir des devis personnalisés et comparer les tarifs, les garanties et les conditions générales. Cela vous permettra de faire un choix éclairé et d'optimiser le coût de votre assurance emprunteur.​ N'hésitez pas à demander l’aide en expert. 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Il s’agit notamment de : Bénéficiaires de la Complémentaire Santé Solidaire (C2S)  Personnes couvertes par l’Aide médicale d’État (AME)  Patients en Affection de Longue Durée (ALD)  Femmes enceintes à partir du 6e mois jusqu’à 12 jours après l’accouchement Femmes ayant recours à une IVG  Jeunes femmes de moins de 26 ans dans le cadre de la contraception (actes et contraceptifs) Personnes victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle  Victimes d’un attentat  Personnes bénéficiant de programmes de prévention (M’T Dents, dépistages organisés, etc.). Dans ces cas précis, le tiers payant s’applique de droit, sans que le patient ait besoin d’en faire la demande. Pour les autres assurés, le tiers payant peut être accordé sur présentation des justificatifs (carte Vitale, attestation de mutuelle), mais reste facultatif et dépend de la politique du professionnel de santé. Comment fonctionne le tiers payant ? Le fonctionnement du tiers payant repose sur la présentation de 2 éléments : La carte Vitale, mise à jour  La carte de tiers payant délivrée par la mutuelle santé. Ces documents permettent au professionnel de santé de transmettre directement les informations aux caisses et complémentaires pour un remboursement sans avance de frais. À noter : pour les situations particulières (ALD, grossesse, C2S, etc.), il est essentiel de mettre à jour sa carte Vitale régulièrement, notamment dans les bornes en pharmacie ou en caisse primaire. Pour les patients dans l’incapacité de se déplacer, l’Assurance maladie peut être contactée par courrier ou téléphone pour mettre à jour les droits ou les cartes. En cas de tiers payant accepté, le professionnel de santé est payé directement par l’Assurance maladie et/ou la mutuelle, évitant ainsi une avance pour le patient. Le tiers payant est-il total ou partiel ? Il existe 2 formes de tiers payant : 1. Le tiers payant partiel Il concerne uniquement la part prise en charge par l’Assurance maladie (ex. : 70 % pour une consultation classique). Le patient doit régler le reste à charge, soit : la participation forfaitaire de 2 € par consultation les dépassements d’honoraires éventuels  la part complémentaire, remboursable ensuite par la mutuelle. Exemple : Une consultation à 50 € chez un spécialiste en secteur 2 : L’Assurance maladie rembourse 19 € (70 % de 30 € - participation forfaitaire de 2 €) ; Le patient paie 29 € au médecin, dont une partie sera remboursée par la complémentaire. 2. Le tiers payant total Dans ce cas, le patient ne paie rien sur le moment. L’Assurance maladie prend en charge sa part, et la mutuelle couvre le reste immédiatement. Cela suppose que : Le professionnel accepte le tiers payant intégral. La mutuelle couvre bien les frais restants. Aucun dépassement d’honoraires n’est à la charge de l’assuré (ou est remboursé selon le contrat). Attention : certains frais peuvent malgré tout être déduits ultérieurement par l’Assurance maladie (franchise médicale, participation forfaitaire). Le tiers payant total est le plus avantageux pour les patients, mais il dépend de plusieurs conditions : le contrat de mutuelle, les accords de tiers payant, et l’acceptation du professionnel. Ce qu’il faut retenir sur le tiers payant Le tiers payant est un levier essentiel d’accès aux soins. Il permet d’éviter une avance de frais, mais son application varie selon les actes, les professionnels, et le contrat de mutuelle. Grâce aux obligations sur le 100 % santé et à l’automatisation pour certains publics, le dispositif gagne en accessibilité. Cependant, pour en bénéficier pleinement, il est crucial de : Vérifier les garanties de sa mutuelle  Mettre à jour régulièrement sa carte Vitale  Identifier les professionnels acceptant le tiers payant total. Conseil d’expert : avant chaque consultation, pensez à demander si le professionnel pratique le tiers payant (et sous quelle forme), pour éviter toute mauvaise surprise.

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Assurance emprunteur : contrat bancaire ou individuel, quel est le moins cher en 2025 ?

En 2025, face à un marché immobilier qui se redresse peu à peu et une réglementation favorable à la concurrence, les emprunteurs se posent la question légitime : vaut-il mieux choisir le contrat d’assurance de prêt proposé par la banque ou opter pour un contrat individuel auprès d’un assureur alternatif ? Tour d’horizon du marché, des tarifs et des arbitrages clés pour faire le bon choix. Un marché immobilier en crise mais en voie de stabilisation Depuis 2021, le marché immobilier a connu une baisse drastique de ses volumes de transactions, passant de 1,2 million de ventes à environ 780 000 en 2024. Cette chute, liée à la hausse des taux d’intérêts, a mécaniquement réduit les opportunités commerciales pour l’assurance emprunteur. Mais les signaux d’un redémarrage se précisent : plusieurs assureurs constatent un regain d’activité depuis fin 2024, augurant une reprise progressive en 2025. Cette dynamique nouvelle offre un contexte favorable à une concurrence plus vive entre bancassureurs et assureurs alternatifs. Surtout que la loi Lemoine, entrée en vigueur en 2022, permet désormais aux emprunteurs de changer d’assurance de prêt immobilier à tout moment, sans attendre la date anniversaire du contrat. Loi Lemoine : vers une démocratisation du changement d’assurance Après les lois Lagarde (2010), Hamon (2014) et l’amendement Bourquin (2018), la loi Lemoine représente une avancée majeure en matière de liberté de choix pour l’emprunteur. Elle autorise la résiliation du contrat d’assurance quand l’emprunteur le souhaite, et ce dès le lendemain de la signature de l’offre de prêt, ouvrant ainsi la voie à une véritable concurrence tarifaire. Mais en pratique, les effets de cette loi ont été quelque peu ralentis par le contexte économique. Les bancassureurs, en position de quasi monopole lors de la souscription du crédit (77 % de parts de marché), ne facilitent pas toujours la substitution. Allers-retours administratifs, délais rallongés, contre-offres de dernière minute… autant de freins, certains à la limite de la légalité, qui rendent le changement d’assurance plus complexe qu’il n’y paraît.  Et pour cause, les marges bancaires sur l’assurance de prêt peuvent aller jusqu’à 70%, une manne à laquelle les établissements de crédit ne comptent pas renoncer.  Contrat groupe ou contrat individuel : 2 approches bien distinctes Les banques proposent généralement des contrats groupes, standardisés, avec des garanties mutualisées. Ces formules sont simples à souscrire et directement intégrées au crédit immobilier. En face, les contrats individuels des assureurs alternatifs offrent une tarification personnalisée, souvent plus compétitive, notamment pour les profils jeunes, non-fumeurs ou présentant peu de risques de santé. Quelle part de marché pour les assureurs alternatifs ? Selon les derniers chiffres, les assureurs hors bancassurance détiennent désormais près de 23 % du marché à la souscription. Et leur part ne cesse de croître grâce à la montée en puissance des résiliations post-crédit. Entre 2022 et 2024, le taux de résiliation a d’ailleurs doublé. Le modèle d’acquisition a changé : aujourd’hui, 70 % des contrats individuels sont souscrits après la signature du prêt immobilier. La progression des assureurs alternatifs reste très lente et plus que modérée : leurs parts de marché sont passées de 15,6% en 2021 à 16,1% en 2023, les bancassureurs détenant près de 84% des contrats d’assurance de prêt en stock.  Combien peut-on économiser en changeant d’assurance emprunteur ? C’est la question centrale pour les emprunteurs en 2025 : les contrats individuels sont-ils vraiment plus avantageux financièrement ? D’après le Comité consultatif du secteur financier (CCSF), le bilan est nuancé : Dans 32 % des cas, le contrat de la banque reste moins cher. Dans 36 % des cas, le contrat individuel permet de gagner jusqu’à 2 000 € sur toute la durée du prêt (soit environ 8,50 € d’économie mensuelle sur 20 ans). Dans les 32 % restants, l’écart dépasse les 2 000 €, avec même 2 % des cas où l’économie dépasse 7 000 €. À retenir : les économies potentielles varient fortement selon le profil de l’emprunteur, son âge, son état de santé, la durée restante du prêt et le capital assuré. Critères Contrat bancaire Contrat individuel (en délégation) Tarification Standardisée, peu personnalisée Personnalisée selon âge, profession, santé Coût moyen Souvent plus élevé sur toute la durée du prêt Plus de 7 000€ d’économies potentielles Souscription Automatique avec le prêt immobilier Démarche séparée, souvent avec un courtier Souplesse des garanties Limitée, garanties uniformisées Plus de choix, ajustements possibles, rachat d’exclusion de garantie Accès au changement Résiliation à tout moment grâce à la loi Lemoine, mais manœuvres dilatoires des banques Résiliation à tout moment grâce à la loi Lemoine Profil idéal Emprunteur avec risque aggravé ou prêt court Jeunes, non-fumeurs, bons profils de santé Parts de marché à la souscription du prêt (2024) 77% 23% (en hausse) Une guerre tarifaire toujours plus intense La bataille se joue essentiellement sur le prix. Depuis une dizaine d’années, les assureurs alternatifs ont ajusté leurs grilles tarifaires à plusieurs reprises pour séduire les emprunteurs. Swiss Life, Cardif, Groupama, Alptis ou encore April ont ainsi multiplié les offres et segmenté leur clientèle pour proposer des couvertures adaptées à tous les profils, des jeunes actifs aux professions libérales. Les bancassureurs ont dû réagir : entre 2019 et 2023, leurs tarifs ont baissé de 15 % à 23 % en moyenne. Cette stratégie vise à limiter l’évasion de leurs clients vers la concurrence. L’importance de bien maîtriser la substitution Changer de contrat d’assurance emprunteur reste une démarche encadrée. Pour réussir sa substitution, il faut respecter plusieurs étapes :  envoi d’un nouveau contrat qui présente une équivalence de garanties avec celui de la banque acceptation par cette dernière dans les 10 jours ouvrés mise en place du nouveau contrat et rédaction de l’avenant résiliation de l’ancien.  Cette complexité a incité de nombreux courtiers à investir massivement dans des outils de gestion et des plateformes d’accompagnement. Certains, comme le courtier Magnolia.fr qui propose une palette de 29 contrats, ont même mis en place des services internes dédiés aux procédures de résiliation et de substitution. Objectif : fluidifier le parcours et lever les blocages. Assurabilité, mutualisation… les nouveaux enjeux du marché La baisse des tarifs pose aussi la question de la rentabilité. Avec l’accès à l’assurance emprunteur sans questionnaire médical pour les prêts inférieurs à 200 000 €, le risque de sinistres augmente. Pourtant, le ratio sinistres/primes reste raisonnable (autour de 50 %), bien inférieur à d’autres branches comme l’auto ou la santé. Pour que le modèle reste pérenne, assureurs et banques doivent affiner leur tarification et leur sélection des risques. Certains craignent une segmentation excessive, où seuls les meilleurs profils bénéficient des offres les plus avantageuses, remettant en cause la logique de mutualisation des risques en assurance emprunteur. Ce qu’il faut retenir Le contrat bancaire garde l’avantage de la simplicité et de l’intégration directe à l’offre de prêt. Il reste compétitif pour certains profils, notamment en cas de conditions négociées. En revanche, les contrats individuels se révèlent nettement plus économiques pour deux tiers des emprunteurs, surtout ceux qui prennent le temps de comparer les offres et d’optimiser leur couverture.