Changer d’assurance emprunteur est aujourd’hui plus simple grâce à la loi Lemoine, entrée en vigueur en 2022. Celle-ci permet de résilier son contrat à tout moment afin de faire des économies tout en étant mieux couvert. Elle permet aussi de bénéficier de la suppression du questionnaire de santé sous certaines conditions. Si ces avancées ont révolutionné le marché de l’assurance de prêt immobilier, elles ne sont pas sans risques pour les emprunteurs.
Certaines clauses ou situations méconnues peuvent en effet entraîner une absence temporaire ou partielle de couverture, et donc des frais importants en cas d’accident, de maladie ou d’invalidité. Voici 4 écueils à connaître avant de changer ou de souscrire votre assurance de prêt immobilier.
1.Trou de garantie : quand vous n’êtes couvert par aucun assureur
Le trou de garantie est sans doute le risque le plus redoutable pour un emprunteur. Il se produit lorsqu’un décalage temporel survient entre la fin du contrat d’assurance sortant et le début du nouveau contrat. Pendant ce laps de temps, l’emprunteur n’est protégé par aucune couverture, ce qui peut avoir des conséquences financières graves en cas de sinistre.
Prenons un exemple concret :
Cette situation survient souvent par méconnaissance des délais administratifs ou à cause d’un mauvais alignement entre les contrats. Pour éviter ce piège, il est essentiel de :
- Vérifier la date exacte de résiliation du contrat sortant et celle d’entrée en vigueur du nouveau, ainsi que les délais de carence et franchise sur certaines garanties.
- Anticiper les démarches auprès de la banque, qui doit valider l’équivalence des garanties avant tout changement.
- Demander à votre nouvel assureur de confirmer par écrit la continuité de la couverture, sans interruption.
Un simple oubli peut coûter plusieurs milliers d’euros, surtout si un sinistre survient au mauvais moment.
2.Délai de carence : une garantie différée sans que vous le sachiez
Le délai de carence en assurance de prêt est une autre subtilité souvent ignorée des emprunteurs. Il s’agit d’une période suivant la souscription du contrat pendant laquelle certaines garanties ne s’appliquent pas encore. Autrement dit, vous payez votre assurance, mais n’êtes pas encore pleinement couvert.
Ce délai peut varier selon les compagnies et les types de garanties. Par exemple :
- Pour la garantie perte d’emploi, la carence peut atteindre 3 à 6 mois.
- Pour les garanties ITT et invalidité permanente totale ou partielle (IPT et IPP), certains contrats prévoient également une carence, généralement de 1 à 3 mois.
Si un emprunteur tombe malade ou subit un accident durant cette période, l’assurance refusera l’indemnisation au motif que le sinistre est survenu avant la fin du délai de carence.
Or, en changeant d’assurance de prêt immobilier, beaucoup pensent bénéficier immédiatement des mêmes protections que précédemment. Ce n’est pas toujours le cas : un contrat peut comporter une clause de carence que l’ancien n’avait pas.
Le bon réflexe : avant de signer, comparez les conditions générales des 2 contrats et demandez à votre assureur si une période de carence s’applique. Si oui, planifiez le changement à un moment où vous êtes en bonne santé et sans risque professionnel ou personnel imminent.
Sachez qu’il existe des contrats d’assurance de prêt sans délai de carence.
3.Franchise en ITT : une clause qui retarde votre indemnisation
Autre paramètre souvent négligé : la franchise en ITT, la garantie qui entre en jeu en cas d’arrêt de travail temporaire pour maladie ou accident. La franchise correspond au nombre de jours pendant lesquels l’assureur ne verse aucune indemnité après la survenue d’un sinistre. Elle débute à partir du premier jour d’arrêt de travail reconnu par la Sécurité sociale.
La durée de cette franchise varie selon les contrats, entre 15, 30, 60 ou 90 jours, voire 180 jours.
Cela signifie que si vous êtes en arrêt de travail pendant 2 mois avec une franchise de 90 jours, vous ne percevrez aucune indemnité. Seuls les arrêts supérieurs à la durée de franchise déclenchent la prise en charge, et une fois échu le délai de carence.
Cette clause a un impact direct sur le niveau de protection de votre prêt immobilier. En cas d’accident ou de maladie longue durée, vous pourriez devoir continuer à rembourser vos mensualités sans aide de l’assurance pendant plusieurs semaines.
Lors d’un changement de contrat, il est donc crucial de :
- Comparer les délais de franchise de votre ancien et de votre nouvel assureur.
- Vérifier si la franchise s’applique par sinistre ou par période d’arrêt, car cela change tout.
- Sauf protection complémentaire (voir plus bas), privilégier un contrat avec une franchise courte, quitte à payer une cotisation légèrement plus élevée.
Une mauvaise compréhension de cette clause peut faire perdre des milliers d’euros à un emprunteur qui pensait être couvert dès le premier jour d’arrêt.
Bon à savoir : si, en tant que salarié, vous bénéficiez d’un contrat de prévoyance au sein de votre entreprise, contenant des garanties arrêt de travail, vous percevez des indemnités journalières qui viennent compenser la perte de revenus en cas de maladie ou d’accident. Ces IJ s’ajoutent aux indemnités versées par la Sécu et votre employeur. Sélectionnez dans ce cas une franchise longue car vous êtes indemnisé par ailleurs.
4.Exclusion des maladies préexistantes : un risque pour les assurés fragiles
Depuis la suppression du questionnaire médical dans certains cas (capital ≤ 200 000 € et fin de remboursement avant 60 ans), les assureurs ont dû adapter leurs politiques de souscription. Pour se préserver d’un “mauvais risque”, certains contrats comportent désormais une exclusion de garantie des maladies préexistantes.
Concrètement, cela signifie que les pathologies connues avant la signature du contrat ne seront pas couvertes.
Exemple : si vous avez déjà consulté un médecin pour un problème de dos avant de changer d’assurance et que ce trouble s’aggrave ou devient récurrent après la souscription, le nouvel assureur peut refuser la prise en charge, estimant qu’il s’agit d’une maladie préexistante.
Cette exclusion pose un problème d’équité, surtout pour les personnes atteintes de maladies chroniques (asthme, diabète, troubles articulaires, etc.) ou ayant un antécédent médical léger. Certains assureurs appliquent cette clause même lorsque le questionnaire de santé n’a pas été exigé, ce qui soulève des débats juridiques.
En théorie, refuser la couverture d’une pathologie antérieure sans questionnaire de santé contrevient à l’esprit de la loi Lemoine. De rares cas de refus de prise en charge ont déjà été signalés au Médiateur de l’assurance, qui recommande de mieux encadrer ces exclusions.
Conseil pratique : avant de signer, demandez expressément à votre assureur si les maladies préexistantes sont exclues, et exigez une mention écrite. Si vous suivez un traitement, vérifiez que la garantie incapacité ou invalidité couvre bien votre situation actuelle.
Changer d’assurance emprunteur avec vigilance
La substitution d’assurance de prêt immobilier est une opération qui permet de réduire considérablement le coût total de votre crédit, et souvent d’améliorer la couverture, mais cela doit être mené avec la plus grande attention. Les trous de garantie, les délais de carence, les franchises longues et les exclusions médicales sont autant de points de vigilance qui peuvent compromettre votre protection financière.
Avant de résilier, prenez le temps de :
- Lire attentivement les conditions générales de votre nouveau contrat ;
- Vérifier les dates de transition entre anciens et nouveaux assureurs ;
- Comparer les garanties ITT, IPT, IPP, décès, perte d’autonomie et leurs modalités d’application ;
- Faire appel à un courtier spécialisé capable de vérifier l’équivalence des garanties et d’éviter toute mauvaise surprise.
En matière d’assurance emprunteur, le diable se cache dans les détails. La vigilance est le meilleur bouclier contre les imprévus. Un contrat plus économique ne doit jamais se faire au détriment de la qualité de la couverture.