Carte Européenne d’Assurance Maladie (CEAM) : mode d’emploi pour voyager serein en Europe
Vous partez bientôt en Espagne, au Portugal ou en Grèce ? Vous accompagnez votre enfant qui s’envole pour un semestre Erasmus ? Vous travaillez entre la France et le Luxembourg ? Avant de glisser votre passeport dans la valise, avez-vous pensé à votre Carte Européenne d’Assurance Maladie (CEAM) ?
Encore trop méconnue ou confondue avec une assurance voyage classique, la CEAM fait pourtant partie des indispensables à emporter pour tout séjour temporaire en Europe. Et contrairement à ce que beaucoup croient, être citoyen européen ne suffit pas à être automatiquement couvert en cas de souci de santé à l’étranger.
Car non, “être en Europe” ne garantit pas une prise en charge gratuite ou immédiate si vous tombez malade ou devez consulter un médecin en urgence. Et oui, même un simple oubli de cette carte peut vous coûter cher.
Cet article vous explique concrètement à quoi sert la CEAM (et ce qu’elle ne couvre pas), qui peut l’obtenir et comment, quelles démarches effectuer avant et pendant votre séjour et comment éviter les mauvaises surprises si un pépin de santé survient loin de chez vous.
Étudiants, parents, travailleurs frontaliers, seniors, vacanciers ou digital nomads : ce guide est fait pour vous.
Qui peut obtenir la CEAM, comment la demander et combien de temps est-elle valable ?
La Carte Européenne d’Assurance Maladie (CEAM) ne s’obtient pas automatiquement, et elle est strictement personnelle. Que vous soyez étudiant·e, retraité·e ou salarié·e, vous devez en faire la demande vous-même. Voici les conditions d’éligibilité, les délais à anticiper, et vos recours en cas de départ imprévu.
Conditions d’éligibilité : qui a droit à la CEAM ?
Vous pouvez bénéficier de la CEAM si vous êtes :
- Un·e salarié·e ou indépendant·e affilié·e à la Sécurité sociale de votre pays,
- Un·e étudiant·e en échange Erasmus ou en stage,
- Un·e retraité·e résidant dans votre pays d’assurance,
- Un·e ayant droit, c’est-à-dire un enfant ou un membre de la famille couvert par l’assurance d’un autre.
À savoir : chaque membre de la famille doit avoir sa propre carte, y compris les enfants mineurs.
Même si vous ne prévoyez qu’un court séjour en Europe, vous êtes concerné. La CEAM ne dépend pas de votre niveau de revenus ni de votre situation familiale, mais de votre statut d’assuré social.
Faire sa demande ou renouveler sa CEAM : démarches et délais
En France, la CEAM peut être commandée gratuitement en quelques clics. Encore faut-il s’y prendre à temps. Selon votre régime d’affiliation, plusieurs options sont possibles :
- Assuré·e du régime général : faites votre demande sur ameli (rubrique "Mes démarches") ou via l’application mobile Ameli.
- Affilié·e à la MSA (Mutualité sociale agricole) : passez par le portail msa.
- Fonction publique, mutuelle militaire ou régime spécial : contactez directement votre organisme.
Vous pouvez aussi appeler le 36 46 (coût d’un appel local) pour obtenir de l’aide.
Délais moyens : comptez entre 10 et 20 jours pour recevoir la carte par courrier.
Départ imminent ? Demandez un certificat provisoire de remplacement (CPR)
Si votre départ approche et que vous n’avez pas reçu la carte à temps, vous pouvez demander un certificat provisoire de remplacement (CPR). Il est délivré immédiatement et reste valable 3 mois. Ce document a la même valeur juridique que la CEAM pendant votre séjour.
Où le demander ? Sur votre compte Ameli ou par téléphone (36 46) ou auprès de votre caisse MSA si vous êtes affilié au régime agricole.
Validité de la CEAM : deux ans, mais vigilance sur la date d’expiration
La CEAM est valable 2 ans à partir de sa date d’émission. Passé ce délai, elle n’est plus utilisable, même si vous êtes toujours couvert par votre Sécurité sociale. Il vous appartient donc d’en suivre la validité et d’anticiper le renouvellement.
Conseil pratique : vérifiez la date imprimée sur votre carte avant chaque départ. Certains assurés croient être couverts alors que leur CEAM a expiré depuis plusieurs mois.
Comment faire pour utiliser la CEAM à l’étranger ?
Posséder la CEAM est une première étape. Savoir comment la présenter, dans quels établissements et comment gérer les situations imprévues, c’est ce qui garantit une bonne prise en charge.
Utiliser la CEAM à l’étranger : mode d’emploi au quotidien
Vous avez reçu votre CEAM, bravo ! Mais pour en tirer pleinement profit, encore faut-il savoir où la présenter, comment réagir si elle est refusée et que faire en cas d’oubli ou d’urgence médicale à l’étranger. Voici vos réflexes à adopter, étape par étape.
Où présenter votre CEAM à l’étranger ?
Votre Carte Européenne d’Assurance Maladie ne fonctionne pas partout, ni avec tous les professionnels de santé. Pour qu’elle soit prise en compte :
Présentez-la à l’accueil des établissements publics, centres de santé conventionnés ou cliniques affiliées à la Sécurité sociale locale.
En pratique :
- Elle doit être montrée au moment de la consultation ou à l'enregistrement.
- Elle vous permettra de bénéficier des mêmes conditions de soins et de tarification que les assurés du pays visité. Cela inclut parfois une prise en charge directe, ou le paiement d’un reste à charge local (ticket modérateur).
Exemple : en Espagne, vous pouvez accéder aux centres de santé publics (centros de salud) avec votre CEAM sans avoir à avancer les frais. En Allemagne, il est parfois nécessaire de régler d’abord, puis de se faire rembourser.
Que faire en cas de perte, d’oubli ou de refus de la CEAM ?
Même avec une CEAM en règle, certains établissements peuvent refuser de la prendre en compte, par ignorance ou absence de convention. Et si vous l’avez simplement oubliée à la maison, voici quoi faire :
1. Demandez un certificat provisoire de remplacement (CPR)
Il s'agit d’un document officiel qui remplace votre CEAM. Vous pouvez le demander à tout moment auprès de votre caisse d’assurance (ex : Ameli, MSA). Il est valable 3 mois et peut être transmis par mail ou fax à l’hôpital étranger.
2. Conservez absolument tous les justificatifs
Si vous avez dû avancer les frais, pensez à :
- Demander une facture détaillée (avec date, nature des soins, nom du médecin),
- Exiger une preuve de paiement (reçu, ticket de caisse, relevé bancaire).
Ces documents vous serviront à demander un remboursement à votre retour, auprès de votre caisse d’affiliation en France, selon les tarifs en vigueur dans le pays de soins.
Dans certains cas, même une prise en charge en établissement privé peut être partiellement remboursée si les soins étaient jugés urgents et justifiés.
Comment fonctionne le remboursement avec la CEAM ?
La CEAM facilite l’accès aux soins, mais les modalités de remboursement varient selon les pays : avance des frais, remboursement sur place ou retour en France. Il est crucial de bien comprendre ces options.
Deux circuits de remboursement selon votre situation
Quand vous êtes soigné·e dans un pays de l’Union européenne avec votre CEAM, deux options s’offrent à vous :
Option 1 : Soins pris en charge directement, sans avance de frais
Dans certains cas, surtout dans les hôpitaux ou les centres publics conventionnés, votre CEAM permet une prise en charge immédiate. L’établissement transmet directement la facture à la caisse locale, vous ne payez rien ou presque.
Par exemple, si vous consultez aux urgences dans un hôpital public espagnol, votre CEAM est acceptée, vous n’avez rien à débourser.
Option 2 : Vous avancez les frais, puis vous demandez un remboursement
Si la CEAM n’est pas acceptée sur place ou si vous avez consulté dans un établissement où elle ne s’applique pas, vous pouvez quand même :
- Demander un remboursement auprès de la caisse du pays de séjour, selon les règles locales,
- Ou attendre le retour en France pour déposer une demande de remboursement à votre caisse d’assurance maladie (ex : CPAM), sur la base des tarifs français.
Astuce : utilisez le formulaire S3125 « Soins reçus à l’étranger » pour faciliter votre demande.
Ce qui peut rester à votre charge : attention aux frais non remboursables
Chaque pays applique ses propres règles de prise en charge. Et ces règles ne sont pas toujours aussi généreuses qu'en France. Résultat : vous pourriez devoir payer certains frais de votre poche, appelés « reste à charge ».
Voici ce qui peut rester à votre charge :
1. Le ticket modérateur
C’est la part des dépenses de santé que vous devez payer vous-même, même après remboursement par l’assurance maladie locale. Dans certains pays, ce montant est fixe, dans d'autres, il correspond à un pourcentage de la consultation ou des soins.
2. Les frais annexes
Il peut s’agir de prestations de confort ou non urgentes qui ne sont pas prises en charge par la sécurité sociale locale. Par exemple :
- La chambre individuelle à l’hôpital,
- Le transport médical non urgent,
- Des soins paramédicaux ou examens non prescrits.
3. Les actes ou les médicaments non remboursés
Si un acte médical ou un médicament n’est pas reconnu ou remboursé dans le pays où vous êtes soigné·e, vous devrez en assumer la totalité du coût même si ces soins sont couverts en France.
Exemple concret : la Belgique
Une consultation chez un médecin généraliste coûte environ 25 euros. Même avec votre CEAM, 6 à 7 euros peuvent rester à votre charge, selon les conditions locales.
Renseignez-vous avant votre départ sur le système de santé du pays où vous vous rendez. Le site du CLEISS propose des fiches pays détaillées avec les règles de prise en charge.
La CEAM dans le contexte européen : une carte née d’une logique juridique et sociale
Au-delà de son aspect pratique, la CEAM est un instrument de coordination sociale mis en œuvre par des règlements européens. Elle incarne un engagement européen pour la continuité des droits sociaux.
Base juridique : les règlements CE 883/2004 et CE 987/2009
La Carte Européenne d’Assurance Maladie n’est pas une invention administrative sans fondement : elle repose sur deux textes clés du droit européen :
- Le règlement CE 883/2004 qui organise la coordination des systèmes de sécurité sociale au sein de l’UE,
- Et son règlement d'application, le CE 987/2009, qui en précise les modalités pratiques.
Ces textes garantissent que vous conservez vos droits sociaux (santé, retraite, famille…) même en cas de mobilité temporaire ou permanente entre pays européens.
En clair : la CEAM n’est pas un gadget. Elle incarne une solidarité entre pays membres, organisée autour d’un socle juridique commun.
Où la CEAM est-elle valable ?
La CEAM fonctionne dans un espace bien défini. Elle est valable dans :
- Les 27 pays de l’Union européenne,
- Les pays de l’Espace économique européen (EEE) : Norvège, Islande, Liechtenstein,
- La Suisse, grâce à un accord spécifique,
- Le Royaume-Uni, dans le cadre de l'accord de retrait post-Brexit.
Bon à savoir : malgré le Brexit, la CEAM reste acceptée au Royaume-Uni (et réciproquement) grâce à l'accord sur la coordination des droits sociaux signé entre le Royaume-Uni et l’UE.
En revanche, la CEAM ne fonctionne pas automatiquement dans les autres pays, même francophones comme le Canada, ou voisins comme la Turquie ou le Maroc.
Mais… il existe des exceptions ! Certains États ont signé avec la France (ou d'autres pays européens) des accords bilatéraux de Sécurité sociale. Ils permettent parfois une prise en charge partielle ou sous conditions, mais sans passer par la CEAM. Il faut alors se référer à des formulaires spécifiques.
Pays où la CEAM est valable en 2025
Zone géographique |
Pays concernés |
Remarques spécifiques |
Union Européenne (UE) |
Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Chypre*, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, Suède |
CEAM acceptée partout dans les établissements publics ou conventionnés |
Espace Économique Européen (EEE) |
Islande, Liechtenstein, Norvège |
CEAM valable selon les mêmes règles que dans l’UE |
Suisse |
Oui |
CEAM acceptée malgré le fait que la Suisse ne fait pas partie de l’UE ni de l’EEE |
Royaume-Uni |
Oui |
Accord spécifique post-Brexit : CEAM toujours valable pour les séjours temporaires |
Autres pays (hors UE/EEE/Suisse) |
Non valable, sauf exceptions |
Certains pays ont des accords bilatéraux (ex. : Québec, Maroc, Tunisie), mais ils ne relèvent pas de la CEAM |
*Chypre : seule la République de Chypre (zone sud) est concernée. La partie nord (République turque de Chypre Nord) n’est pas reconnue par l’Union européenne, donc la CEAM n’y est pas valable.
À retenir :
- La CEAM ne couvre pas les soins dans les pays hors UE/EEE/Suisse, même s’ils sont francophones ou proches géographiquement.
- Pour les pays non couverts, il est fortement conseillé de souscrire une assurance voyage privée.
Avant de partir hors Europe, vérifiez auprès du CLEISS ou de votre caisse d’assurance si une convention existe, et si une assurance voyage complémentaire est recommandée.
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