Crédit immobilier 2022 : les règles d'octroi inchangées

Un homme en chemise cravate avec de grosses lunettes regarde l'objectif d'un air dubitatif

La messe est dite. À compter du 1er janvier 2022, les nouvelles règles d'accès à l'emprunt immobilier passent du statut de simples consignes à celui de normes imposées aux banques. À défaut, celles-ci pourront être sanctionnées. Pour les emprunteurs, pas de surprise, puisque ces conditions d'octroi s'appliquent déjà depuis un an. On peut toutefois s'attendre à une plus grande rigueur de la part des établissements prêteurs pour éviter le coup de bâton du gendarme financier.

Une norme obligatoire

Lors d'une réunion mardi 14 décembre dernier, le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) a fait le bilan de sa recommandation du 27 janvier 2021 relative à l'octroi des crédits résidentiels, avant de confirmer que les préconisations en place depuis cette date deviendront juridiquement contraignantes à compter du 1er janvier prochain, comme il l'avait fermement indiqué en septembre dernier.

Chargée de la surveillance du système financier, l'instance placée sous la tutelle du ministre de l'Économie s'est félicitée que les dernières données disponibles sur la mise en œuvre des consignes de janvier 2021 permettent de dresser un bilan positif : "les conditions d'octroi ont continué à s’assainir – globalement et pour chacun des réseaux bancaires pris individuellement – au cours du dernier trimestre, sans que cela ne remette en cause la forte dynamique de la distribution du crédit immobilier, à des taux d’intérêt qui restent historiquement bas".

Les règles de distribution du crédit immobilier aux particuliers deviennent une norme à laquelle les banques ne pourront déroger, sauf à la marge, sous peine de sanctions administratives de la part de l'Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR).

C'est là le seul changement qui s'opérera à partir du 1er janvier 2022, les prêts à l'habitat accordés depuis un an étant en conformité avec le cadre dorénavant réglementaire, à savoir :

  • le taux d'endettement est limité à 35% des revenus nets de l'emprunteur (avant impôt) ;
  • la durée de remboursement ne peut excéder 25 ans, voire 27 ans en cas de différé d'amortissement de 2 ans (immobilier neuf, construction de maison neuve et immobilier ancien avec travaux de rénovation) ;
  • le montant de l'emprunt est plafonné à 7 années de revenus.

Sur l'ensemble de la production trimestrielle, 20% des crédits octroyés peuvent s'écarter des critères, à hauteur de 80% minimum à destination de la primo-accession et de l'acquisition de la résidence principale. Cette marge de flexibilité garde les mêmes proportions en 2022 et selon les observations du courtier Empruntis, les banques se sont mises en ordre de marche depuis la fin du premier semestre.

Une activité immobilière à son plus haut niveau

Pour le HCSF, "la mesure est d'autant plus importante dans le contexte d'une progression des risques immobiliers à travers l'Europe en sortie de crise". Les nouveaux critères contribuent à contenir ces risques potentiels en France et force est de constater qu'ils n'ont pas ralenti la production de crédits à l'habitat.

Selon les chiffres de la Banque de France, l'encours annuel se situait à 1 201 milliards d'euros à fin octobre 2021, soit une progression de 6,4% par rapport à 2020. Chaque mois de l’année écoulée, les banques ont distribué plus de 22 milliards d'€ aux Français pour acheter un logement, une moyenne record comparée à l'année 2019 historiquement dynamique s'il en est, puisqu'elle a généré la décision des autorités financières de juguler le crédit.

La pierre fait rêver les Français, d'autant plus en cette période inédite marquée par des contraintes et des restrictions. Nombreux sont ceux qui ont pu réaliser ce rêve en 2021. À fin octobre selon les données des Notaires de France, près de 1 200 000 transactions immobilières ont été réalisées sur douze mois, un niveau inégalé et une hausse de 14,5% par rapport à 2019, la fameuse année de tous les dangers.

Un crédit strictement encadré, pas accessible à tous

L'accession à la propriété reste néanmoins à l'état de fantasme pour certains ménages. Le respect des conditions d'octroi oblige désormais à mobiliser un apport personnel conséquent (jusqu'à 30% du montant de l'opération), ce qui est compliqué voire impossible pour les candidats les moins bien dotés, à commencer par les jeunes actifs, habituellement endettés sur les durées les plus longues aux taux les moins performants pour compenser l'absence de mise initiale. 

L'encadrement strict du crédit s'avère un garde-fou pour ces ménages trop fragiles financièrement dans l’immédiat pour devenir propriétaires. Au-delà de la mensualité du crédit, ils oublient souvent qu’en tant que propriétaires ils doivent s’acquitter de la taxe foncière, à moins d’être éligible à l’exonération temporaire de 2 ans (logement ancien avec travaux d’économie d’énergie et construction nouvelle). 

Entre 2010 et 2020, le montant moyen de cette taxe a bondi de près de 28% ! Une hausse trois fois supérieure à celle des loyers et de l’inflation sur la période. À Nantes, Villeurbanne, Clermont et Lille, l’augmentation a dépassé les 35% ! En 2022, compte tenu de la remontée de l’inflation, la taxe foncière va progresser de plus de 3,4%. Les centaines voire milliers d’euros annuels versés aux communes et aux collectivités locales au titre de la taxe foncière pèsent lourdement sur le budget des ménages déjà fortement endettés. Les banques tiennent compte de ce paramètre et mettent en garde les candidats à l’emprunt quant aux frais annexes qu’ils devront assumer une fois devenus propriétaires de leur logement.

Autres candidats à l'emprunt immobilier empêchés par les nouvelles règles : les seniors et les personnes avec des risques aggravés de santé. Le coût très élevé de l'assurance de prêt se heurte aux taux de l'usure, devenus historiquement bas en raison du niveau plancher des taux d'intérêts. Les banques n'ont plus le droit d'exclure les primes d'assurance pour effectuer le calcul du taux d'endettement. Bien qu'ils soient parfaitement solvables, ces profils ne peuvent concrétiser leur projet immobilier, car l'assurance, nécessaire à l'obtention du financement, pèse trop lourd dans le Taux Annuel Effectif Global (TAEG) qui doit être contenu sous le seuil légal.

De l'avis des courtiers, les plus touchés seraient pourtant les investisseurs immobiliers. Ils ne peuvent plus compter sur les futurs revenus locatifs pour diminuer la charge mensuelle d'emprunt, car les banques les intègrent désormais aux revenus globaux, ce qui a pour effet de rehausser le taux d'endettement. Quand on rembourse déjà un premier crédit sur la résidence principale, l'équation n'est pas tenable, même si les revenus sont confortables et le reste à vivre suffisant.

Publié par Herve Labatut

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Bon à savoir : certaines mutuelles limitent le tiers payant à certains professionnels de santé ou à certains actes (ex. : consultations généralistes, pharmacie), alors que d’autres l’étendent largement. Astuce : vérifiez si votre mutuelle est partenaire d’un réseau de soins, car cela favorise l’application automatique du tiers payant chez les professionnels affiliés. Choisir une mutuelle avec tiers payant vous garantit une couverture santé sans avance de frais de manière totale ou partielle (voir plus bas).  Sur quoi s’applique le tiers payant en santé ? Les principes du tiers payant peuvent s’appliquer sur tout acte pris en charge par l’Assurance maladie : consultations, médicaments, analyses, radiologie, hospitalisation… mais avec des variations selon le professionnel ou le type de soin. En pratique, il est quasiment généralisé : en pharmacie  dans les laboratoires d’analyses  dans les centres de santé  dans les hôpitaux publics  chez de nombreux médecins libéraux, notamment généralistes et spécialistes. En revanche, certains secteurs restent à la traîne : dentistes libéraux (hors centres dentaires), kinés, infirmiers, radiologues appliquent le tiers payant de manière plus sélective. Certains soins ne sont jamais concernés, notamment : la médecine douce (ostéopathie, acupuncture, sophrologie…)  la chirurgie esthétique, non remboursée  les médicaments non substituables, sauf si mention du médecin. Est-ce que le tiers payant est automatique ? Non, le tiers payant n’est pas automatique pour tous. Mais dans certains cas, les professionnels de santé ont l’obligation de l’appliquer. Il s’agit notamment de : Bénéficiaires de la Complémentaire Santé Solidaire (C2S)  Personnes couvertes par l’Aide médicale d’État (AME)  Patients en Affection de Longue Durée (ALD)  Femmes enceintes à partir du 6e mois jusqu’à 12 jours après l’accouchement Femmes ayant recours à une IVG  Jeunes femmes de moins de 26 ans dans le cadre de la contraception (actes et contraceptifs) Personnes victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle  Victimes d’un attentat  Personnes bénéficiant de programmes de prévention (M’T Dents, dépistages organisés, etc.). Dans ces cas précis, le tiers payant s’applique de droit, sans que le patient ait besoin d’en faire la demande. Pour les autres assurés, le tiers payant peut être accordé sur présentation des justificatifs (carte Vitale, attestation de mutuelle), mais reste facultatif et dépend de la politique du professionnel de santé. Comment fonctionne le tiers payant ? Le fonctionnement du tiers payant repose sur la présentation de 2 éléments : La carte Vitale, mise à jour  La carte de tiers payant délivrée par la mutuelle santé. Ces documents permettent au professionnel de santé de transmettre directement les informations aux caisses et complémentaires pour un remboursement sans avance de frais. À noter : pour les situations particulières (ALD, grossesse, C2S, etc.), il est essentiel de mettre à jour sa carte Vitale régulièrement, notamment dans les bornes en pharmacie ou en caisse primaire. Pour les patients dans l’incapacité de se déplacer, l’Assurance maladie peut être contactée par courrier ou téléphone pour mettre à jour les droits ou les cartes. En cas de tiers payant accepté, le professionnel de santé est payé directement par l’Assurance maladie et/ou la mutuelle, évitant ainsi une avance pour le patient. Le tiers payant est-il total ou partiel ? Il existe 2 formes de tiers payant : 1. Le tiers payant partiel Il concerne uniquement la part prise en charge par l’Assurance maladie (ex. : 70 % pour une consultation classique). Le patient doit régler le reste à charge, soit : la participation forfaitaire de 2 € par consultation les dépassements d’honoraires éventuels  la part complémentaire, remboursable ensuite par la mutuelle. Exemple : Une consultation à 50 € chez un spécialiste en secteur 2 : L’Assurance maladie rembourse 19 € (70 % de 30 € - participation forfaitaire de 2 €) ; Le patient paie 29 € au médecin, dont une partie sera remboursée par la complémentaire. 2. Le tiers payant total Dans ce cas, le patient ne paie rien sur le moment. L’Assurance maladie prend en charge sa part, et la mutuelle couvre le reste immédiatement. Cela suppose que : Le professionnel accepte le tiers payant intégral. La mutuelle couvre bien les frais restants. Aucun dépassement d’honoraires n’est à la charge de l’assuré (ou est remboursé selon le contrat). Attention : certains frais peuvent malgré tout être déduits ultérieurement par l’Assurance maladie (franchise médicale, participation forfaitaire). Le tiers payant total est le plus avantageux pour les patients, mais il dépend de plusieurs conditions : le contrat de mutuelle, les accords de tiers payant, et l’acceptation du professionnel. Ce qu’il faut retenir sur le tiers payant Le tiers payant est un levier essentiel d’accès aux soins. Il permet d’éviter une avance de frais, mais son application varie selon les actes, les professionnels, et le contrat de mutuelle. Grâce aux obligations sur le 100 % santé et à l’automatisation pour certains publics, le dispositif gagne en accessibilité. Cependant, pour en bénéficier pleinement, il est crucial de : Vérifier les garanties de sa mutuelle  Mettre à jour régulièrement sa carte Vitale  Identifier les professionnels acceptant le tiers payant total. 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Assurance emprunteur : contrat bancaire ou individuel, quel est le moins cher en 2025 ?

En 2025, face à un marché immobilier qui se redresse peu à peu et une réglementation favorable à la concurrence, les emprunteurs se posent la question légitime : vaut-il mieux choisir le contrat d’assurance de prêt proposé par la banque ou opter pour un contrat individuel auprès d’un assureur alternatif ? Tour d’horizon du marché, des tarifs et des arbitrages clés pour faire le bon choix. Un marché immobilier en crise mais en voie de stabilisation Depuis 2021, le marché immobilier a connu une baisse drastique de ses volumes de transactions, passant de 1,2 million de ventes à environ 780 000 en 2024. Cette chute, liée à la hausse des taux d’intérêts, a mécaniquement réduit les opportunités commerciales pour l’assurance emprunteur. Mais les signaux d’un redémarrage se précisent : plusieurs assureurs constatent un regain d’activité depuis fin 2024, augurant une reprise progressive en 2025. Cette dynamique nouvelle offre un contexte favorable à une concurrence plus vive entre bancassureurs et assureurs alternatifs. Surtout que la loi Lemoine, entrée en vigueur en 2022, permet désormais aux emprunteurs de changer d’assurance de prêt immobilier à tout moment, sans attendre la date anniversaire du contrat. Loi Lemoine : vers une démocratisation du changement d’assurance Après les lois Lagarde (2010), Hamon (2014) et l’amendement Bourquin (2018), la loi Lemoine représente une avancée majeure en matière de liberté de choix pour l’emprunteur. Elle autorise la résiliation du contrat d’assurance quand l’emprunteur le souhaite, et ce dès le lendemain de la signature de l’offre de prêt, ouvrant ainsi la voie à une véritable concurrence tarifaire. Mais en pratique, les effets de cette loi ont été quelque peu ralentis par le contexte économique. Les bancassureurs, en position de quasi monopole lors de la souscription du crédit (77 % de parts de marché), ne facilitent pas toujours la substitution. Allers-retours administratifs, délais rallongés, contre-offres de dernière minute… autant de freins, certains à la limite de la légalité, qui rendent le changement d’assurance plus complexe qu’il n’y paraît.  Et pour cause, les marges bancaires sur l’assurance de prêt peuvent aller jusqu’à 70%, une manne à laquelle les établissements de crédit ne comptent pas renoncer.  Contrat groupe ou contrat individuel : 2 approches bien distinctes Les banques proposent généralement des contrats groupes, standardisés, avec des garanties mutualisées. Ces formules sont simples à souscrire et directement intégrées au crédit immobilier. En face, les contrats individuels des assureurs alternatifs offrent une tarification personnalisée, souvent plus compétitive, notamment pour les profils jeunes, non-fumeurs ou présentant peu de risques de santé. Quelle part de marché pour les assureurs alternatifs ? Selon les derniers chiffres, les assureurs hors bancassurance détiennent désormais près de 23 % du marché à la souscription. Et leur part ne cesse de croître grâce à la montée en puissance des résiliations post-crédit. Entre 2022 et 2024, le taux de résiliation a d’ailleurs doublé. Le modèle d’acquisition a changé : aujourd’hui, 70 % des contrats individuels sont souscrits après la signature du prêt immobilier. La progression des assureurs alternatifs reste très lente et plus que modérée : leurs parts de marché sont passées de 15,6% en 2021 à 16,1% en 2023, les bancassureurs détenant près de 84% des contrats d’assurance de prêt en stock.  Combien peut-on économiser en changeant d’assurance emprunteur ? C’est la question centrale pour les emprunteurs en 2025 : les contrats individuels sont-ils vraiment plus avantageux financièrement ? D’après le Comité consultatif du secteur financier (CCSF), le bilan est nuancé : Dans 32 % des cas, le contrat de la banque reste moins cher. Dans 36 % des cas, le contrat individuel permet de gagner jusqu’à 2 000 € sur toute la durée du prêt (soit environ 8,50 € d’économie mensuelle sur 20 ans). Dans les 32 % restants, l’écart dépasse les 2 000 €, avec même 2 % des cas où l’économie dépasse 7 000 €. À retenir : les économies potentielles varient fortement selon le profil de l’emprunteur, son âge, son état de santé, la durée restante du prêt et le capital assuré. Critères Contrat bancaire Contrat individuel (en délégation) Tarification Standardisée, peu personnalisée Personnalisée selon âge, profession, santé Coût moyen Souvent plus élevé sur toute la durée du prêt Plus de 7 000€ d’économies potentielles Souscription Automatique avec le prêt immobilier Démarche séparée, souvent avec un courtier Souplesse des garanties Limitée, garanties uniformisées Plus de choix, ajustements possibles, rachat d’exclusion de garantie Accès au changement Résiliation à tout moment grâce à la loi Lemoine, mais manœuvres dilatoires des banques Résiliation à tout moment grâce à la loi Lemoine Profil idéal Emprunteur avec risque aggravé ou prêt court Jeunes, non-fumeurs, bons profils de santé Parts de marché à la souscription du prêt (2024) 77% 23% (en hausse) Une guerre tarifaire toujours plus intense La bataille se joue essentiellement sur le prix. Depuis une dizaine d’années, les assureurs alternatifs ont ajusté leurs grilles tarifaires à plusieurs reprises pour séduire les emprunteurs. Swiss Life, Cardif, Groupama, Alptis ou encore April ont ainsi multiplié les offres et segmenté leur clientèle pour proposer des couvertures adaptées à tous les profils, des jeunes actifs aux professions libérales. Les bancassureurs ont dû réagir : entre 2019 et 2023, leurs tarifs ont baissé de 15 % à 23 % en moyenne. Cette stratégie vise à limiter l’évasion de leurs clients vers la concurrence. L’importance de bien maîtriser la substitution Changer de contrat d’assurance emprunteur reste une démarche encadrée. Pour réussir sa substitution, il faut respecter plusieurs étapes :  envoi d’un nouveau contrat qui présente une équivalence de garanties avec celui de la banque acceptation par cette dernière dans les 10 jours ouvrés mise en place du nouveau contrat et rédaction de l’avenant résiliation de l’ancien.  Cette complexité a incité de nombreux courtiers à investir massivement dans des outils de gestion et des plateformes d’accompagnement. Certains, comme le courtier Magnolia.fr qui propose une palette de 29 contrats, ont même mis en place des services internes dédiés aux procédures de résiliation et de substitution. Objectif : fluidifier le parcours et lever les blocages. Assurabilité, mutualisation… les nouveaux enjeux du marché La baisse des tarifs pose aussi la question de la rentabilité. Avec l’accès à l’assurance emprunteur sans questionnaire médical pour les prêts inférieurs à 200 000 €, le risque de sinistres augmente. Pourtant, le ratio sinistres/primes reste raisonnable (autour de 50 %), bien inférieur à d’autres branches comme l’auto ou la santé. Pour que le modèle reste pérenne, assureurs et banques doivent affiner leur tarification et leur sélection des risques. Certains craignent une segmentation excessive, où seuls les meilleurs profils bénéficient des offres les plus avantageuses, remettant en cause la logique de mutualisation des risques en assurance emprunteur. Ce qu’il faut retenir Le contrat bancaire garde l’avantage de la simplicité et de l’intégration directe à l’offre de prêt. Il reste compétitif pour certains profils, notamment en cas de conditions négociées. En revanche, les contrats individuels se révèlent nettement plus économiques pour deux tiers des emprunteurs, surtout ceux qui prennent le temps de comparer les offres et d’optimiser leur couverture.